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Retour au sens et au contenu à la FIAC
Intro Nicole Esterolle
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Mon ami critique d’art, Christian Noorbergen m’a téléphoné aussitôt après sa visite de la FIAC pour me dire que quelque- chose d’important se passait là , comme une mue, un changement de « paradigme », une sorte de divine apostasie. Il me dit avoir vu de ses propres yeux comme une invasion d’œuvres à contenu sensible et à forte inventivité formelle, qui prenait ainsi le pas sur le tout conceptualo-bidulaire inregardable auquel on était habitué.
J’ai demandé à Christian s’il voulait m’exprimer par écrit sa satisfaction, pour que je puisse la communiquer aux lecteurs du Vadrouilleur Urbain. ..Ce qu’il a donc fait aimablement ( en me joignant quelques images d’œuvres de bon aloi ) et que je vous joins ci-dessous.
Ce texte me semble important car il pointe cette mutation esthétique autant qu’idéologique du grand marché, que l’on espérait sans y croire…et qui conforte les propos récents de Mathilde Serelle sur la pourtant bien-pensante et pieuse France-Culture :
« Les signaux se multiplient et convergent autour d’un centre : la critique de l’art contemporain, ou plutôt de son système n’est plus le simple fait d’une bande de réacs hostiles aux nouvelles formes de l’art ».
Retour donc au sens, au contenu, au vécu, au savoir-faire, à la mise en forme sensible, à la poésie… Toutes valeurs redoutablement réactionnaires pour les suppôts d’un système de moins en moins crédible… Merci Christian pour ta collaboration !
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La FIAC, fin de l’errance ?
Par Christian Noorbergen
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J’avoue, il m’était arrivé de ne plus aller à la Fiac, par fatigue morale et visuelle. Voire d’y aller par curiosité un peu malsaine, pour voir les nouveaux monstres de la modernité triomphante, préférant souvent la classieuse proximité d’Art Elysées, ou d’Outsider Art Fair, vraiment superbe cette année. Flottait naguère dans la gigantesque enceinte fiaquée, une forme de vague ennui collectif affaité et très chic, avec, ici et là, quelques soubresauts d’orgasmes financiers. On parle encore beaucoup, beaucoup d’argent, à la Fiac, avec un rien (un beaucoup ?) d’obscénité sociale.
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Choc, cette année, dès mes premiers pas au Grand Palais où règne la FIAC. Atmosphère d’emblée frémissante, plutôt joyeuse et même conviviale. L’an dernier, j’avais perçu des frémissements. Là, le pas est franchi, sans doute irréversible. Il y a à voir. Les œuvres sont là, quasi à ne pas croire, mais elles sont là, elles abondent un peu partout. Quand j’expédiais au pas de charge ma visite obligée, j’ai pris le temps de savourer l’art à vraie présence. Je n’ai pas vu le premier étage, mais le voir jubilatoire m’a transporté. La FIAC a changé. J’ai été déçu en bien, m’attendant à voir justifiés de ma part, comme les années précédentes, quelques préjugés ringards dont je n’avais pas honte, ou si peu. Estomaqué de la qualité vivante de la plupart des œuvres exposées. Les gadgets et les mickeys attendus ont quasi disparus ! Révolution ! Au point que le très estimable salon d’Art Elysées pourrait paraître timide et gentil. Les œuvres en mettent plein la vue au cœur ému d’un mental enfin oxygéné.
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Cassio VASCONCELLOS Brésil 2015.
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Bref la FIAC a pris un vrai tournant, regard décillé sur l’ensemble de la création ouvert et plurielle d’hier (quel fabuleux Karel Appel !) et d’aujourd’hui. Un miracle ? Les signes de fatigue et de saturation de l’hyper-contemporain fabriqué n’étaient donc pas tous des illusions ? On n’ose y croire…
Regard enfin dessillé. La reine n’est plus nue, la FIAC 2019 s’est vêtue d’oripeaux saisissants et beaux. Oripeaux beaux ? Ça sonne bizarre…
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