Je présente une série d’œuvres constituée de bas-reliefs qui s’inspire des bidonvilles du monde. Ils constituent à eux seuls des univers parallèles de bric et de broc en constante expansion. Je procède à partir de photographies et de documentations retrouvées sur le net. Je focalise mon attention surtout sur l’habitation elle-même plutôt que sur ses occupants. L’idée n’étant pas de faire abstraction du genre humain, mais d’éviter une imagerie trop narrative des faits à l’allure d’un photoreportage. La condition humaine est alors suggérée par la représentation de son habitacle. Des abris souvent dérisoires qui ne protègent pas de grand-chose; les toits de tôles qui deviennent brûlant sous le soleil, les portes qui ne ferment à peu près pas, les mauvais matériaux de construction, les terrains inondables et pollués… Et il y a aussi, dans ce concentré de misère, ces sourires qui s’affichent parfois. De même, j’ai cherché à sublimer, le temps d’un tableau, toute cette précarité et à l’instar de l’artiste martiniquais Serge Hélénon à «repérer l’intérêt dans le négligeable, le signifiant dans l’insignifiant, l’esthétique dans l’inesthétique»*. Voilà donc le regard que je tente sur le monde avec espoir qu’il s’aura susciter quelque chose en vous.
*Serge Hélénon: une esthétique de l`inesthétique,texte de Gerry L`Etang.

Trois années révolues à Saint-Henri ont profondément influencé l’art d’Isa B. Un quartier industriel, populaire, chargé d’histoire, aux murs écaillés, aux piaules rapiécées, un quartier ayant gardé l’empreinte de ses habitants successifs, un quartier révélateur d’individualités. Arrivée au moment de sa restructuration, puis expropriée, Isa B a été témoin au quotidien de la destruction de ce patrimoine. Alors, elle ramasse et accumule une quantité d’objets hétéroclites, pièces de métal, clous, bois, cordes, restes de murs, grillages. Des objets chargés d’histoires et de traces de vie, jetés, délaissés, rebus de notre société qui ne cesse d’effacer le passé pour ne retenir que le présent. Isa B va alors leur redonner vie en les clouant, les collant, en les associant en de nouvelles scènes, réalisant ainsi des tableaux où la vie et la mort se rencontrent pour mieux nous faire apprécier la beauté et la fragilité du monde.
Extrêmement proche de la philosophie du peintre et architecte Autrichien Hundertwasser, notamment de sa théorie sur la troisième peau de l’homme, Isa B attache une importance toute particulière à l’habitat. Les maisons de Saint-Henri, rafistolées, consolidées, aménagées par leurs occupants avec les moyens du bord, illustrent parfaitement le droit à « sa libre intervention sur sa maison » proclamé par cet architecte.
Isa B réalise ses œuvres comme un individu bâtit sa maison. Les matériaux utilisés sont semblables : ciment, bois, clous et objets de récupération. Ses œuvres sont lourdes, solides, capables de résister à l’épreuve du temps. Artiste obsessionnelle, maniaque du détail, tout doit être rempli, le vide nié, l’espace entièrement contrôlé. Une multitude de clous, de pièces métalliques assemblées en mosaïque ou structures tridimensionnelles recouvrent de larges pans de ses tableaux. Outre le rôle esthétique et symbolique de ces éléments, leur réalisation, longue et nécessitant des gestes répétitifs, répond aux besoins d’introspections d’Isa B. Ainsi chacune de ses œuvres est comme une maison dans laquelle elle a laissé un peu de son âme, un moyen peut-être pour elle aussi de braver la mort et d’échapper au temps.
Le site de l’artiste: http://isa-b-art.blogspot.ca/
Une expo à voir à revoir et à acheter.
J'aimeJ'aime